Quand deux metteurs en scène phares de la scène internationale contemporaine s’attaquent à deux monstres sacrés de l’œuvre de Shakespeare…

Vous avez peut-être pu découvrir récemment le Makbeth du Munstrum Théâtre, à la Scène nationale de Malakoff. Poursuivez cette exploration, à la fois de la tragédie shakespearienne, mais également de la nouvelle scène dramatique, avec le Richard III d’Itay Tiran (Israël), en tournée pour la première fois en France et aux Gémeaux, Scène nationale de Sceaux.

Richard III / Macbeth ou la Figure du héros sanguinaire shakespearien

Richard III et Macbeth sont deux pièces totems de l’œuvre du dramaturge britannique. Écrites avec plus de dix ans d’écart, elles se répondent pourtant comme deux miroirs, jusqu’à l’une des répliques finales de Macbeth « Je suis plongé dans le sang » qui sonne comme une réponse à celle de Richard III « Je suis plongé dans le péché ».

Au cœur des deux pièces, la thématique de l’Ambition, qui se traduit pour chacune d’elles par un désir de puissance démesuré, menant à une ascension fulgurante, puis à une chute brutale. Cette ambition, pour laquelle les deux protagonistes font le choix du mal en pleine conscience, se révèle être le moteur de crimes impitoyables et plonge les héros dans la folie.

Là où le miroir est inversé, c’est que Richard III est d’une nature profondément mauvaise et va accomplir son destin sans remords, tandis que Macbeth, lui, va devoir lutter contre sa nature originellement bonne pour devenir un monstre.

Deux mises en scène qui se rejoignent dans leur modernité et leur radicalité

Bien qu’ayant chacun une singularité marquée, les univers du Munstrum et d’Itay Tiran se ressemblent en ce sens qu’ils nous donnent à voir des mondes durs, sombres et féroces, mais toujours traversés par une dimension farcesque avec une vraie jubilation théâtrale.

Ce sont deux esthétiques créatrices d’images fortes et radicales, comme par exemple ce Richard III, incarné par une comédienne avec une chaussure d’homme et un talon haut, figurant l’infirmité du personnage, ou son homme de main, en combinaison de protection, déployant des bâches plastiques avant chaque meurtre, ou encore un Macbeth entièrement nu, et couvert d’un sang épais et filandreux, dans la scène ultime de folie. Citons également ce parallèle entre une scène qui se couvre petit à petit de sang dans Makbeth, et de cendres noires (ultimes restes des suppliciés) dans Richard III.

Dans ces mondes, l’Humanité n’a plus de genre, lady Macbeth est jouée par un homme et Richard III par une femme, les comédiens sont affublés de masques ou de maquillage, le visage peint en blanc de Richard III le rendant proche d’une sorte de Joker, révélant le caractère universel des personnages.

Enfin, la finalité du propos est également très proche : l’obsession, la violence et le fétichisme du pouvoir alliés à la barbarie qui en découle. Dans les deux cas, les personnages de Shakespeare sont les révélateurs d’une critique sans concession de l’actualité politique, et de son gouvernement en particulier pour Itay Tiran.

La venue du Munstrum Théâtre faisait déjà figure d’évènement sur notre Territoire, celle du metteur en scène israélien exilé en Allemagne Itay Tiran l’est tout autant, si ce n’est plus encore, puisqu’il s’agit d’une Première en France.

Ça se passe où et quand ?

Richard III : Les Gémeaux – Scène nationale (Sceaux), samedis 14 et 21 mars 2026 à 18H, dimanches 15 et 22 mars 2026 à 17H, mercredis 18 et 25, jeudis 19 et 26, vendredi 20, mardi 24 mars 2026 à 20H.

Pour aller plus loin…

Pour plus d’informations sur le Munstrum Théâtre, n’hésitez pas à consulter notre article ici